Bail emphytéotique

Définition du bail emphytéotique

Type de bail locatif immobilier conclu entre deux parties pour une durée minimale de 18 ans, et dans la limite de 99 ans. Il démembre le droit de propriété entre le propriétaire (le tréfoncier) et son locataire (l'emphytéote) tout en conférant à ce dernier un droit réel sur le bien loué.

Auparavant utilisé essentiellement pour des terres agricoles, le bail emphytéotique s'est aujourd'hui largement étendu au secteur tertiaire. Il est également employé par les professionnels de l'immobilier dans le cadre d'opérations de promotion ou de valorisation foncière.

Caractéristiques juridiques du bail emphytéotique

Le bail emphytéotique est régi par les articles L. 451-1 à L. 451-13 du Code rural et de la pêche maritime. Il est défini dans l'article 1 par deux conditions cumulatives :

  • sa durée (entre 18 et 99 ans) et l'impossibilité de le prolonger par tacite reconduction ;
  • le caractère du droit conféré au preneur : un droit réel cessible, saisissable et hypothécable.

Le contrat peut comporter des restrictions, mais toute clause limitant excessivement ces droits est susceptible de remettre en cause sa qualification.

Les droits du preneur et du bailleur

Le bail emphytéotique octroie au preneur des droits plus étendus que dans le cadre d'un bail commercial traditionnel, proches de ceux d'un propriétaire.

  • Le preneur peut céder ou hypothéquer son droit de jouissance.
  • Le preneur peut grever son bien de servitudes ou le sous-louer.
  • Le preneur peut effectuer des travaux d'amélioration, de construction et de démolition, et choisir la destination des ouvrages édifiés (dans le respect des règles d'urbanisme et des limites imposées par le contrat).

L'emphytéote n'a toutefois pas le droit de vendre le bien lui-même : cette prérogative reste l'apanage du propriétaire bailleur.

Les droits du bailleur :

  • Vendre ses droits de propriété liés au bail (sans affecter la situation du locataire).
  • Récupérer la pleine propriété du bien au terme du contrat, avec les constructions et améliorations éventuellement réalisées par l'emphytéote, sans indemnités à verser (sauf convention contraire).

Les obligations du preneur

En complément de ses droits, le preneur se doit de respecter les devoirs imposés par le bail emphytéotique.

  • Le preneur est redevable de l'ensemble des charges et des impôts (notamment la taxe foncière).
  • Le preneur doit réaliser l'ensemble des travaux d'entretien et des grosses réparations dans le bien, y compris les travaux de réhabilitation, dès lors qu'ils sont prévus au contrat. Ces obligations constituent la pierre angulaire du bail emphytéotique qui permet la mise en valeur du bien sans que le propriétaire n'ait à supporter les charges d'investissement et de gestion.
  • Le preneur s'engage à ne pas détériorer le bien et à ne pas dévaloriser le fonds.
  • Le preneur verse au bailleur une redevance périodique (le « canon ») au montant généralement modique, fixé en fonction de la durée du contrat et des investissements consentis.

Modalités de gestion et de résiliation du bail emphytéotique

Le bail emphytéotique ne pouvant être prolongé par tacite reconduction, cela doit faire l'objet d'un nouvel accord entre le propriétaire et le preneur.

Le bailleur peut obtenir une résiliation du bail emphytéotique avant le terme en la faisant prononcer par un tribunal. Cela n'est possible qu'en cas de manquement du preneur à ses obligations, en particulier : en cas de défaut de paiement de la redevance pendant deux années consécutives, d'inexécution des obligations contractuelles, ou de dégradations graves causées dans le bien.

Les litiges relèvent de la compétence :

  • Du tribunal administratif lorsque le bailleur est une collectivité publique.
  • Du tribunal judiciaire dans les autres cas.

Cas d'application du bail emphytéotique dans le secteur tertiaire

Le bail emphytéotique est souvent utilisé pour réaliser des projets immobiliers complexes : construction ou réhabilitation d'établissements hôteliers, de centres commerciaux, de bureaux ou d'infrastructures sportives.

Les promoteurs s'en servent pour sécuriser la jouissance d'un terrain sur une longue période. Cela permet de rentabiliser d'importants investissements sans avoir à acquérir la pleine propriété des biens. Les professionnels de la gestion des biens bénéficient de sa grande flexibilité pour gérer leurs portefeuilles et structurer leurs opérations.

Les collectivités locales ont recours à ce type de contrat locatif pour valoriser leur patrimoine foncier tout en déléguant à des opérateurs privés les investissements nécessaires et la gestion des biens.

Les entreprises du secteur tertiaire peuvent tirer plusieurs avantages du bail emphytéotique :

  • Loyers attractifs en contrepartie d'un engagement à long terme.
  • Droit de jouissance stable et transmissible.
  • Financement des investissements grâce à l'hypothèque du droit emphytéotique.

Le bail emphytéotique constitue un outil juridique privilégié dont la spécificité réside dans l'octroi d'un droit réel au locataire assorti d'obligations relatives à la mise en valeur du bien. Pour le bailleur, ce contrat permet de concilier valorisation du patrimoine et flexibilité des opérations de gestion, tout en bénéficiant des transformations effectuées à l'issue du bail.

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